Marche de 26 km.
Une nuit orageuse, une anticipation du chemin à venir... Je suis la première debout, je pars le café, l’odeur me réconforte. Mon lavage d’hier n’a pas séché en raison de l’humidité . Déjeuner composé de tartines confitures avec discussions animées en compagnie de Carole, Jean-Michel (un français) et Simon (canadien anglophone asiatique de la Saskatchewan). Je quitte pour 8:00. Un aurevoir à Jean-Michel qui doit rester ici en raison d’une blessure. Carole et Simon me rejoindrons plus tard.
L’humidité est accablante ce matin, 20 degré de température, la respiration difficile. Paysage brumeux, mais au combien magnifique. Ça ajoute du relief et une impression de « cocooning », je m’y sens bien.
Le téléphone sonne... devinez qui ? JP !! il me dit « j’avais besoin d’entendre « bon matin » et ton rire, comment vas tu Genevieve ? Et ton chemin hier ? » Ce genre d’appel, ça te fait un baume au cœur et à l'âme par sa sincérité. On discute un moment, mais étant dans la forêt le réseau a coupé .
Enfin un chemin comme je les aime ! En montagne, sentiers étroits et glissants, à flanc de falaise sur une trace éboulée avec sur la droite le Gave d’Aspe et son bruit étourdissant. Ahh que ca sent bon une forêt humide !! Je garde l’œil ouvert et redouble de prudence, mais en même temps c'est tellement beau que j’en perd presque toute notion du danger.... Sauf quand le rocher lui-même est pourvu d'un câble d'acier ça me rappelle rapidement que le risque est toujours présent.
Lorsque je quitte les rives du Gave, c'est pour mieux admirer les nouveaux paysages qui m’entourent. Parce qu'en montagne, chaque détour offre une nouvelle vue. Qu'elle soit verte ou rocailleuse, dominée par les rapaces qui nous survolent ou occupée par un berger qu'on entend siffler ou qu’on voit avec son chien au volant de son tracteur, aux vaches et chevaux qui l’habitent, aux moutons qui beuglent, chaque flanc offre un spectacle étourdissant. Je marche le nez en l'air, au risque de trébucher, mais je ne peux pas m’empêcher de me laisser imprégner par ces paysages sans cesse renouvelés.
J'aime la montagne. Je ne me suis jamais expliquée cette fascination, mais elle me procure à chaque fois ces mêmes émotions de calme et bien-être, par son mélange de beauté, de simplicité, de puissance et de sérénité.
Je me surprend à sourire lorsque j’arrive à Bedous, un tout petit village magnifique où tous les gens rencontrés m’ont envoyé la main. Beaucoup d’activités en cours : marcheurs, parapente, des personnes à velo et un homme s’entraînant sur le terrain de foot.
Je poursuis sur de petits chemins de pâture sans difficulté vers Accous où je prendrai la pause dîner. Pèlerin Simon passe rapidement, me saluant, il a pris sa pause un peu plus tôt. Aussi, alors que je m'apprêtais à partir un jeune garçon en vélo, Léo, d’environ 8-9 ans, est venu s’asseoir avec moi en me demandant pourquoi j’étais nue pieds, et qu’une partie de mon linge est à sécher au soleil. On discute un 10-15 min, je prend le temps... pcqu’est-ce que 10-15 min dans une vie !? Je lui explique ce qu’est le chemin, mon pourquoi, ma passion de voyages et randonnées, offre réponse à ses nombreuses questions. Très réfléchi et curieux ce gamin ! Je lui partage mon chocolat. Il est ravi, tout souriant ! Ce que je m’ennuie de mes neveux et ma filleule en ce moment... c’est tellement pur le temps passé avec un enfant.
Direction Borce pour encore 9-10 km sous un ciel plein soleil, les pieds et cœur léger. Mais bizarrement, le tonnerre gronde... en espérant qu’il ne pleut pas, car j’ai mon linge sur la corde (accroché après mon sac).
Je retrouve Simon, perdu dans le bois. Ayant pleine confiance en nature, je l’aide à s’y retrouver. Il me remercie, me laisse passer devant, étant un peu plus rapide que lui... je comprend aussi qu’avec la barrière de la langue, la communication n’est pas si facile entre nous.
Alternance entre une marche sur la nationale assez passante et dans les bois sur des sentiers parfaits pour un beau challenge : étroit, éboulés et avec l’impression de marcher en parallèle avec le flanc de montagne
Arrivée à Borce, café double au bar du coin et du même coup l’épicerie pour un délicieux festin de thon tomaté, lentilles et canne de haricots verts avec pain en tranche... yeah Je vais tellement apprécier un steak ou tout autre plats maison à mon retour au Québec !
Ce soir, je dors au gîte géré par l'unique bar du village. Un bar qui a en outre la particularité d'offrir une carte de 40 bières dont les 2/3 de belges. Bizarrement, contrairement aux autres pèlerins, je n’ai aucunement envie d’alcool après mes randonnées. À mon arrivée à ce gîte, il y a une ambiance jazz créée par un randonneur, Thierry, du GR10, en arrêt ici pour blessures. Il ne le sait pas, mais juste pour ça je l’adore deja . On jase un peu de son GR10... en 5 minutes il réussi à me contaminer par sa piqûre de la randonnée.
Aujourd’hui, Je comptais pousser jusqu’à Urdos pour réduire de 5km mon ascension du Col du Somport prévue demain, mais je voulais passer une dernière soirée avec mes amis pèlerins. Demain, je compte filer en douce et redescende vers Canfranc Estacion pour gagner 8km pour ma dernière journée sur le camino, afin de visiter un peu et savourer la fin de mon chemin à Jaca avant de prendre le transport du retour.
Alors demain, je mettrai le pied en Espagne ! J’arrive à peine à y croire !!
GR10 : sentier de grande randonnée qui relie la Méditerranée à l'Atlantique en passant le long des Pyrénées (en parallèle du chemin des Crêtes, qui propose le même parcours mais en haute montagne).
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